Optima

De nuit.

Je cherchais des anciens résultats de prise de sang cet aprem, quand je suis tombée sur un mot que mon psy m’avait écrit, a nos débuts.

La frontière entre mal traitance et "bien traitance" est assez flou pour moi. Mon psy et mon ancienne psychiatre m’ont posés, au début de notre collaboration, des questions au sujet de mon père. Pour caricaturer : "il vous mal traitait oui ou non?!". Mais j’avais du mal a répondre a ces questions. J’ai eu très longtemps peur de mon père. Jusqu’à il y a encore peu de temps. Il peut se montrer parfois très… je ne sais pas si on peut dire "violent" mais il sait être effrayant. Y’a encore quelques semaines ma mère me disait au téléphone un soir qu’il s’était énervé et qu’elle avait eu peur (bien le genre de truc a aller raconter a sa fille!). Je crois qu’il n’a jamais était "violent" avec mes frères et soeurs comme il a pu l’être avec moi.

Je me souviens de moi, petite fille, courant dans notre long couloir pour lui échapper. Je revois le carelage de notre ancienne maison. La lumière. L’efraiment.
Petite, j’avais des problèmes pour m’endormir et je me réveillais la nuit. J’avais peur du noir. J’avais peur de sombrer dans le sommeil. Toutes les chambres se trouvaient a l’étage, mais les toilettes étaient au rez-de-chaussée. J’avais peur de descendre seule dans cette grande maison plongée dans le noir. Alors, j’allais réveiller ma mère pour qu’elle m’accompagne jusqu’aux toilettes. Elle y passait aussi, et on remontait dans nos chambres respectives. Je ne me souviens pas qu’elle s’en soit plainte. Mais mon père, mes insomnies, ça le rendais fou.

Je me souviens tout particulièrement d’une nuit. On dormais au deuxième étage dans la maison des parents de mon père. Je n’arrivais pas a dormir. Ma mère a du demander a mon père de s’occuper de moi. Ce qui ne lui a pas plu. On est descendu en bas. Il était énervé. Je pleurais je crois. Oui. On est allé dans la cuisine, pour ne pas faire de bruit pour tout les autres qui dormaient. Il a du m’engueuler. Puis, on est sortit dehors. Il y’a un lampadaire sur la rue dont la lumière éclaire une partie du jardin. Mais je me souviens surtout de ce ciel étoilé. Magnifique. Limpide. Un ciel tellement serein en comparaison de ce que je ressentait. On est allé dans une caravane. Je ne vois pas ce que notre caravane pouvait foutre là, donc c’était sans doute celle de mes grands parents, sortie du garage pour faire de la place aux voitures. J’ai fini par m’endormir. Sans doute épuisé d’avoir eu peur, d’avoir trop pleuré. Mais… j’ai le sentiment, depuis très longtemps, qu’il s’est passé quelque chose de grave cette nuit là.
Et je ne sais pas, je n’arrive pas a savoir si… j’ai une sorte d’amnésie a ce sujet ou si juste, il ne s’est rien passé de si grave que ça et que juste, j’ai surreagie. Je ne sais pas.

Mon ancienne psychiatre avait laissé entendre que j’avais du subir un traumatisme pour être tel que je suis.
Mais je sais pas. Je suis juste soulagée d’avoir grandi et d’avoir plus de force pour me défendre, ou au moins pour me remettre plus vite de certains événements déplaisants.

Mon psy, il y a environ trois ans, sentais qu’il y avait peut-être eu quelque chose. Mais je ne savais pas quoi lui dire ! J’étais perdue. En fin de séance, il a alors pris une feuille blanche. Il a écrit un message dessus et a plié la feuille en quatre. Il a mis du scotch sur les deux parties ouvrables de la feuille. Il m’a dit que je pouvais jeter ce papier. Ou l’ouvrir et lire ce qu’il y avait d’écrit. Je pouvais y répondre ou ne pas y répondre.
J’ai ouvert la feuille.

"Que s’est-il passé la nuit?"